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Tout savoir sur le métier de journaliste radio avec Marc Laurendeau

Marc Laurendeau, figure éminente du journalisme radio, au parcours aussi diversifié que captivant et chargé de cours à la Faculté de l’éducation permanente (FEP), partage son expertise à travers une vie riche d’expériences au service de la compréhension profonde de l’actualité.

Marc Laurendeau incarne la polyvalence dans le monde du journalisme, naviguant entre l’écriture, la radio, et la télévision avec une aisance remarquable. Il a débuté sa carrière professionnelle avec une formation en droit et sciences politiques à l’Université de Montréal, amorçant ainsi une carrière d’avocat. C’est aussi un personnage connu pour avoir exploré le monde de l’humour, y consacrant onze années de sa vie. Ce choix n’était pas anodin, puisque son humour était axé sur l’actualité, les rebondissements politiques, sociaux et économiques du moment.

Armé de son expérience juridique et de sa compréhension approfondie des rouages de la société, Marc Laurendeau a fait le saut vers le journalisme. « J’étais prêt pour ça », explique-t-il, soulignant la transition naturelle de son humour basé sur l’actualité vers le domaine journalistique. Il a débuté dans l’écriture avant de s’essayer à la radio, puis à la télévision, avant de revenir à ses racines radiophoniques pour y consacrer de nombreuses années.

À partir de 1995, Marc Laurendeau a partagé son expertise en enseignant le journalisme à l’Université de Montréal. Chargé de cours à la FEP depuis plus de trente-cinq ans, il donne le cours intitulé analyse de l’actualité dans le certificat en journalisme multiplateforme, et transmet désormais son savoir aux étudiantes et étudiants en les guidant dans la compréhension approfondie des évènements. Rencontre avec un journaliste de renom.

Q : Combien d’années avez-vous passées derrière le micro et expliquez-nous, brièvement, vos principales tâches en tant que journaliste radio ?

R : À temps plein, j’ai fait vingt-deux ans de radio pour Radio-Canada. Je faisais la revue de presse le matin, je résumais les courants de pensée le plus objectivement possible, pour que les gens puissent se faire une idée eux-mêmes, pour ne pas les influencer. Quand on est journaliste radio, il faut savoir entretenir une bonne relation avec le public, le tenir intéressé, et savoir communiquer avec lui.

Q : Comment y êtes-vous parvenu ?

R : C’est important qu’un journaliste puisse être multitâche. J’ai fait de la presse écrite, après une période d’humour, pour me bâtir une crédibilité, que le public puisse me lire à travers une argumentation ou un récit. J’ai travaillé pour Montréal-Matin, j’y tenais une chronique sur une page entière avec des échos, des commentaires. Après cela je suis passé éditorialiste puis éditorialiste en chef. Je n’avais pas de formation spéciale pour faire de la radio, j’en avais fait seulement comme humoriste, ce qui n’a rien à voir. Il a fallu que j’apprenne sur le terrain. C’est un apprentissage de tous les jours, car je n’ai pas eu de cours de radio pendant mes études, j’ai tout appris en pratiquant.

Q : Vous avez présenté la revue de presse tous les matins pendant de nombreuses années, était-ce difficile de vous lever aux aurores ?

R : À la radio il faut s’attendre à avoir des horaires anormaux. Quand on fait de la radio matinale, il faut se lever atrocement tôt. Je me levais souvent à quatre heures du matin voire plus tôt pour lire des magazines ou des journaux. À l’époque il n’y avait que des revues papier. Je devais être à cinq heures au bureau. Je recevais Le Soleil de Québec tous les matins, il m’était tout spécialement affrété chaque jour. En bus ! Je recevais aussi le New York Times et le Monde. Ce dernier n’était d’ailleurs pas celui du jour, mais celui de la veille ! Ce n’est qu’à partir de 1997 que je me suis mis à Internet. C’était lors de la tragique disparition de la Princesse Diana, je ne pouvais pas me contenter du contenu des journaux locaux. À partir des années 2000, Radio-Canada a pris un virage international.

Il y a tout de même du plaisir à se lever tôt ! On est en contact avec les auditeurs de manière quotidienne. D’entrée, on accompagne leur levée, leur café et leur bol de céréales. Je communiquais avec eux, parfois de manière sérieuse et parfois je mettais un peu plus d’humour dans mes interventions. J’étais en ondes de cinq à neuf heures pour intervenir sur des nouvelles de tous les horizons. Je passais cinq à six heures par jour à lire des journaux ou des revues. Je ne manquais jamais le Téléjournal, une source d’informations formidable !

Q : Selon votre expérience, que doit développer un journaliste radio ?

R : C’est important de toucher à tout dans ce métier, ne pas juste faire qu’un seul exercice, parce qu’il faut pouvoir saisir une belle occasion à laquelle on ne s’attendait peut-être pas, mais la saisir au vol.

À la radio, il y a beaucoup d’interaction avec les auditeurs, mais aussi avec les autres chroniqueurs. Donc ça demande une certaine souplesse et une capacité à rebondir. Il ne faut pas laisser de temps mort. Il faut garder le rythme et l’attention de l’auditeur, comme en presse écrite quand on doit s’assurer de la véracité des faits. À la radio, on ne fait pas que lire un texte, on en parle et on en discute avec les gens autour de la table et avec les auditeurs.

« C’est important qu’un journaliste puisse être multitâche » – Marc Laurendeau

Q : Racontez-nous trois moments qui vous ont marqué dans votre carrière de journaliste radio.

R : Quand j’ai cessé de faire la revue de presse le matin, j’ai réalisé le documentaire radio sur les correspondants qui s’appelle « Nos témoins sur la ligne de feu ». Je suis parti de la date de création de Radio-Canada en 1937 jusqu’à 2012. J’ai couvert plus de cinq décennies d’histoire des correspondants à l’étranger de Radio-Canada. Ça m’a pris deux années de travail. Je suis allé dans les archives, j’avais des recherchistes et on allait fouiller pour trouver les extraits les plus marquants. Un travail de fourmi, mais un souvenir mémorable.

L’évènement qui m’a le plus marqué a été l’entrevue que j’ai menée avec Hélène Carrère d’Encausse, présidente de l’Académie française. Le sujet portait sur l’intervention des Soviétiques en Afghanistan. Elle connaissait tout sur ce sujet. C’était un grand moment de radio, très sérieux. Je m’étais tellement bien préparé pour cette entrevue de grande envergure.

Mon troisième fait marquant s’est déroulé lorsque j’ai pris le transsibérien de Pékin à Moscou. Je me suis retrouvé dans la capitale russe pendant le coup d’État d’août 1991 destiné à faire tomber Mikhail Gorbatchev. Quelle surprise ! Je venais de terminer une mission au Japon et là, le dimanche soir quand j’arrive, le coup d’État se produit dans la foulée. Les jours suivants j’étais en direct à la radio pour décrire les évènements. J’étais là, au moment où l’histoire prenait un tournant. Ce putsch de Moscou a marqué la chute de l’Union soviétique. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de m’entretenir, plus tard, avec Mikhail Gorbatchev lui-même.

Si je pouvais en ajouter un quatrième, un peu plus drôle, ce serait lorsqu’on a simulé qu’on était en Floride alors qu’on était en direct depuis les locaux de Montréal. On a ajouté des sons d’oiseaux, le bruit des vagues et certains chroniqueurs jouaient le rôle de journalistes locaux. Quant à moi, je faisais une revue de presse des journaux de la Floride, pour encore plus de crédibilité. Peu après, des gens ont appelé Radio-Canada, car ils s’offusquaient qu’on puisse envoyer des journalistes en Floride et donc gaspiller des fonds publics de cette manière. Les esprits se sont calmés lorsque le canular a été révélé.

Q : Vous avez développé une passion pour la radio. Auriez-vous aimé toucher à un autre domaine ?

R : J’ai un peu le regret de ne pas avoir pris le virage journalistique plus tôt et de ne pas avoir été correspondant à l’étranger. C’est lorsque j’ai créé le documentaire radio « Nos témoins sur la ligne de feu », que je m’en suis rendu compte. Mon réalisateur, Mathieu Beauchamp, m’a posé cette question à l’époque, et je lui ai répondu spontanément que oui, je regrettais de ne pas avoir enfilé la tenue du correspondant.

Q : Diriez-vous que la connaissance du multiplateforme est nécessaire dans votre profession ? Que pensez-vous des réseaux sociaux comme source d’information ?

R : Il faut s’informer tous les jours, quel que soit le moyen. Présentement, je dis toujours à mes étudiants de lire un quotidien d’information chaque matin, et si possible sur papier. Je précise, sur papier, parce que de cette manière, on remarque l’organisation des articles que la rédaction a décidé de mettre en avant, selon le sujet.

On ne peut pas se contenter des réseaux sociaux, ce ne sont pas des médias qui informent. Ils peuvent simplement vous donner l’humeur du moment, mais ce n’est pas de l’information qui est vérifiée et rigoureuse. Il n’y a aucun code d’éthique dans les médias sociaux. Pour s’informer, il faut lire Le Monde, le New York Times, Le Devoir, La Presse… Bien sûr, il faut vivre avec son temps. J’ai conscience qu’il faut s’adapter. Les nouveaux journalistes doivent avoir accès aux réseaux pour diffuser l’information, et quand je parle de réseaux, je fais allusion à Twitter, rebaptisé X depuis juillet, qui reste un réseau professionnel et crédible.

Multiplateforme veut dire que nous sommes capables de réverbérer les articles sur différentes plateformes. Il faut composer avec ça, mais avec la plus grande méfiance. Quand j’ai commencé à enseigner, on me rendait des copies dactylographiées et même manuscrites. Aujourd’hui, tous les étudiants ont un ordinateur et ils savent composer avec ces nouvelles technologies.

Q : Quel est le meilleur conseil que vous donnez à vos étudiants et étudiantes ?

R : J’incite toujours les étudiants et les étudiantes à la curiosité et la polyvalence. Il faut foncer ! Soyez à la fois un journaliste qui absorbe les faits, mais qui veut aussi les comprendre. Et puis, à l’ère moderne, effectivement, il faut développer ses aptitudes informatiques pour faciliter la diffusion des nouvelles. Le journaliste a toujours des défis et doit s’attendre à être déstabilisé, mais il ne faut jamais craindre cet aspect, car cela l’amène à s’adapter plus vite et à comprendre plus vite !

Pour en savoir plus sur le certificat en journalisme multiplateforme.

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