Michel Comeau est un ancien policier. De ses 27 années à la Sûreté du Québec, il garde un calme olympien, une analyse acérée et surtout, le sens du contact. Mais, il n’a pas l’habitude de parler de lui. En tant qu’enquêteur polygraphiste, habituellement, c’est lui qui pose les questions et analyse les réponses. Pourtant, dès qu’on l’interroge sur les cours qu’il enseigne à la FEP, ses yeux s’illuminent. On sent la passion qu’il transmet à ses étudiants et étudiantes à qui il enseigne le cours d’entrevues d’enquête, perquisitions et saisies, ainsi que l’atelier d’intégration en enquête qui est une mise en pratique, une sorte de jeu de rôle avec une comédienne à la fin du certificat en enquêtes et renseignement.
Ce spécialiste de la fraude aime les rencontres, l’humain. Pour lui, enquêter, c’est faire preuve d’analyse, de perspicacité, c’est savoir décortiquer les éléments de preuve, mais aussi et surtout manifester son adaptabilité et son sens du contact. « Quand tu enquêtes, tu rentres dans la vie des gens, tu passes beaucoup de temps avec eux, parfois pendant une longue période. Il faut savoir établir un lien avec les familles des victimes, développer de l’empathie, leur faire des comptes rendus et les accompagner. On oublie cet aspect-là du métier, mais c’est important de leur expliquer les choses et d’être à l’écoute. Ça m’est arrivé plusieurs fois que des suspects innocentés grâce au polygraphe me sautent dans les bras. C’est beaucoup d’émotion » souligne Michel Comeau, qui partage dans ses cours son parcours riche dans la police mais aussi dans la banque. Cet enquêteur chevronné enseigne les techniques d’entrevue, dont l’approche qu’il a développée pour la Sûreté du Québec, encore utilisée avec beaucoup de succès pour détecter les fausses allégations.
Rien ne prédisposait Michel Comeau à devenir policier. Comme beaucoup de jeunes au Cegep, il hésite entre plusieurs carrières. Mais quand il découvre la technique policière, c’est le coup de cœur. « J’ai tout de suite senti que c’était ma voie. J’aime le contact avec les gens, qu’ils soient présidents d’entreprise ou itinérants. C’est pour ça que je me suis spécialisé en interrogatoire d’enquête. Entrer dans une salle de 10 par 10 avec deux chaises et une table, et créer un contact avec une personne que je ne connais pas, c’est ça qui m’allume. » confie l’enquêteur. « Et puis, j’aime travailler en équipe, la police, c’est comme une famille, j’ai tout de suite aimé l’esprit de corps de cette profession ». C’est cet amour du contact qu’on sent quand il enseigne.
Une fois policier, il débute au service des fraudes. Cela lui permet de travailler sur des dossiers de long terme qui développent ses compétences d’analyse : malversations, corruption de fonctionnaires, fraudes de carte de crédit, fraudes par chèques, clones de cartes de débit… il fait donc ses armes sur des fraudes principalement financières, ce qui lui permettra plus tard de rejoindre Desjardins puis la Banque Nationale. Son parcours l’amène ensuite à travailler comme enquêteur aux crimes contre la personne : meurtres, homicides, agressions sexuelles… puis gestionnaire au service de l’analyse du comportement où il gèrera les profileurs, les polygraphistes et les psychologues judiciaires. Un parcours riche qui fera de lui un expert des interrogatoires.
Car Michel Comeau a un atout qui bouleversera sa carrière : il parle l’anglais. Cette compétence lui permet d’aller suivre une formation en Ontario sur la polygraphie, la technique du détecteur de mensonges. Il devient ainsi l’un des rares polygraphistes du Québec – ils ne sont que cinq à l’époque - et sillonne la province, jusque dans le Grand Nord, pour épauler les équipes d’enquête dans leurs interrogatoires. « En parlant anglais, j’ai eu la chance de travailler sur des enquêtes très variées auprès de populations anglophones, mais aussi de travailler avec des Inuits et d’aller à leur rencontre » partage-t-il.
Une partie de son rôle de polygraphiste est de former la relève et c’est ainsi qu’il commence à enseigner à l’École de Police. « Je n’aurais jamais imaginé enseigner dans ma vie. Ça m’a tout de suite plu. C’est incroyable l’énergie que je gagne à chaque fois que je donne un cours. J’ai immédiatement eu une satisfaction intérieure qui me donnait à la fois de l’adrénaline et un grand sentiment de bien-être. Depuis, je sens que je suis à ma place quand j’enseigne. Et puis j’aime ce dépassement de soi que ça m’a demandé pour théoriser ma pratique et créer des programmes de formation. Au final, chaque cours est différent parce que j’aime adapter mon discours, connecter avec les étudiants. » confie le chargé de cours, nourri par son rapport aux autres. Toujours le contact avec les autres.
Aujourd’hui retraité de la police, Michel Comeau continue d’exercer avec passion à la Banque Nationale où il est directeur de la sécurité corporative. « Un suspect reste un suspect et les techniques d’entrevue sont les mêmes, mais les enjeux sont différents : les crimes ont souvent lieu sur internet et les fraudeurs peuvent se trouver n’importe où sur la planète… ou au sein même de l’entreprise. » souligne-t-il. Et bien sûr, ce passionné de bateau souriant et enjoué continue d’enseigner aux plus jeunes, au grand bonheur des étudiants du certificat enquête et renseignement qui apprécient son accessibilité et ses conseils précieux : « Le principal conseil que je donne aux étudiants et étudiantes du certificat est d’y aller étape par étape, de trouver un créneau et de franchir les étapes pour devenir un jour enquêteur ou enquêtrice. Je n’ai jamais oublié d’où je viens et j’essaie de rester très terre à terre quand j’enseigne, de rester moi-même. Il ne sert à rien d’essayer d’aller trop vite ».
Pour en savoir plus sur le certificat en enquête et renseignement.
Pour en savoir plus sur le certificat en criminologie.
Pour en savoir plus sur le baccalauréat par cumul en études du phénomène criminel.